Récit de pratique culturelle

La criée des âmes dans une paroisse catholique

Tradition: Christianisme
Appartenance: Catholicisme (rite latin)
Diocèse, association ou regroupement: Diocèse Ste-Anne-de-la-Pocatière
Paroisse, congrégation ou équivalent: Notre-Dame de Bonsecours (L'islet)

Classé sous Organisation religieuse (9200), Communauté (9240), Pratique coutumière (9242)
et sous Organisation religieuse (9200), Laïc (9250), Association religieuse (9251).

Historique général


Les produits offerts
© IPIR 2011, soumis à copyright

Ancienne coutume française, la criée des âmes se veut une pratique à la fois cultuelle et culturelle. À l’origine, elle prenait la forme d’un encan se déroulant tous les dimanches de novembre, mois consacré dans la tradition catholique aux prières adressées aux défunts. Après la messe dominicale, un crieur prenait place sur une tribune placée sur le parvis de l’église pour annoncer la mise aux enchères de produits artisanaux et fermiers apportés par les paroissiens. Les profits ainsi générés par les ventes servaient à payer des messes pour les âmes du purgatoire afin qu’elles puissent accéder au paradis. Apparue en Amérique avec la colonisation française, cette pratique populaire avait lieu dans la plupart des paroisses de Nouvelle-France. Malgré son abandon progressif au cours des XVIIIe et XIXe siècles, la criée des âmes se maintient en certains endroits, notamment à l’Isle-aux-Grues, où elle est célébrée depuis 1836. Puis, au courant du XXe siècle, plusieurs paroisses québécoises reprennent cette coutume, aujourd’hui l’une des plus anciennes traditions religieuses françaises à subsister.

À l’Islet-sur-Mer, municipalité située dans la région de Chaudière-Appalaches, la pratique a été reprise à l’été 1977 à l’occasion des commémorations du 300e anniversaire de la fondation de la seigneurie de l’Islet-Saint-Jean, commémorations pendant lesquelles les paroissiens vendaient à la criée des animaux de la ferme à la manière de leurs ancêtres. Inspiré par la popularité de cet événement, le conseil de la Fabrique Notre-Dame-de-Bonsecours met en place, en 1980, un carnaval annuel afin de financer sa mission. Bien que certaines activités aient été délaissées au fil des ans, ces célébrations se veulent encore aujourd’hui une occasion privilégiée de participer à la criée des âmes et aux autres traditions ancestrales de la région, telle la parade des berlots.

Description


La mise en encan
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Annuellement, en février, la Fabrique de la paroisse Notre-Dame-de-Bonsecours organise une journée dédiée à la criée des âmes, activité permettant de financer l’entretien et la conservation de son patrimoine religieux.

Traditionnellement, la matinée est consacrée à la parade des berlots, type particulier de carrioles tirées par des chevaux inventé au Québec à la fin du XIXe siècle. Autrefois, le défilé débutait par le carnaval du chiard blanc, un plat à base de pommes de terre, d’oignons et de lard salé. La présentation des duchesses et l’élection d’une reine animaient également l’évènement. Depuis quelques années, une trentaine de traineaux, mettant en valeur le savoir-faire ancestral de l’attelage des chevaux et la conduite des carrioles, participent au défilé. L’arrivée à l’église pour la messe dominicale se fait d’ailleurs en berlot. Un repas communautaire composé de spécialités locales telles que des fèves au lard ou du chiard blanc est ensuite offert aux participants.

Avant la criée des âmes, les marguilliers procèdent à la cueillette de biens —tels sirop d’érable, biscuits, mets maison, produits fermiers, objets artisanaux, pièces d’orfèvrerie— offerts par la communauté. Une fois les dons recueillis, les responsables de la fabrique procèdent à l’inventaire et à l’étiquetage des produits. Tous les participants reçoivent un programme expliquant le déroulement de la vente aux enchères pour faciliter le déroulement de l’activité. Debout dans le chœur de l’église, le crieur, aussi appelé encanteur, annonce aux paroissiens les biens mis en vente et fixe la somme de départ. Les participants signalent leur intérêt en levant la main et en annonçant le montant qu’ils désirent offrir pour l’acquisition d’un produit, lequel est adjugé au plus offrant. Lors de l’événement, des mets préparés par les membres de la fabrique sont servis.

Encouragés par les commentaires du crieur, les paroissiens se montrent généreux, déboursant une somme excédant la valeur monétaire réelle des articles acquis. Certains produits vendus année après année sont d’ailleurs très prisés de la communauté et adjugés à prix fort. Annuellement, plus de 250 personnes, dont la générosité permet à la fabrique d’amasser plusieurs milliers de dollars pour la conservation de son patrimoine, participent à la criée des âmes.

Apprentissage et transmission


Les participants à la Criée des âmes
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Bien qu’ayant perdu son sens originel lié à la célébration du souvenir des défunts, la criée des âmes se perpétue aujourd’hui dans certaines régions du Québec. Alors que les fonds jadis recueillis servaient à payer des messes pour les âmes du purgatoire, les sommes de nos jours amassées financent les divers travaux d’entretien des paroisses et pallient à la dîme et à la capitation autrefois versées à l’Église. Aujourd’hui, la communauté offre ses contributions volontaires pour perpétuer la tradition de la criée des âmes. Bref, en organisant des activités s’attachant à l’entretien et la conservation de son église paroissiale, la Fabrique Notre-Dame-de-Bonsecours assure à la fois la transmission et la sauvegarde de son patrimoine matériel et immatériel, en plus de célébrer des pratiques culturelles ancestrales, telles la criée des âmes et la parade des berlots.

Localisation

Municipalité: L'Islet-sur-Mer
Région administrative: 12 Chaudière-Appalaches
Lieu: Paroisse Notre-Dame-de-Bonsecours, 15, rue des Pionniers Est, L'Islet-sur-Mer (Qc), G0R 2B0
Téléphone: 418- 247-5328

Source

Marguerite Thériault, Jacqueline Caron, Jeanine Caron-Giasson, Conrad Caron et Jean-Marc Cloutier
Lien avec la pratique : Ils sont responsables de l'orgnisation de la criée des âmes à la paroisse Notre-Dame-de-Bonsecours de l'Islet

Enquêteurs : Marjolaine Boutin, Louise Saint-Pierre, Anaïs Drendel, Valérie Vachon-Bellavance
Date d'entrevue : 6 février 2011


Partenaires

La réalisation de l’Inventaire du patrimoine immatériel religieux a été rendue possible grâce à l’appui de six partenaires: